Connaissez-vous vraiment Robert Parker ?

Considéré comme le plus grand critique que le monde viticole ait connu, Robert Parker a participé à l’essor des grands vins.

Considéré comme le plus grand critique que le monde viticole ait connu, Robert Parker a pendant plus de 30 ans participé à l’essor des grands vins avant de prendre sa retraite en 2019, à l’âge de 71 ans. Créateur du célèbre magazine Wine Advocate, le critique américain surnommé “le nez à un million de dollars” n’a pourtant découvert sa passion pour le vin et la dégustation qu’à l’âge de 21 ans.

Découvrons son parcours, ses goûts, l’incontournable classement Parker ainsi que des controverses qui ont pu rythmer sa carrière. L’icône viticole Robert Parker n’aura maintenant plus de secrets pour vous.

Ses débuts

Robert Parker, de son nom de naissance Robert McDowell Parker, est né le 23 juillet 1947 à Batimore dans l’État du Maryland au Etats-Unis. Fils de paysan, Robert Parker étudie tout d’abord l’histoire de l’art avant d’obtenir un doctorat en droit en 1973. Fraîchement diplômé, il va exercer le métier d’avocat au sein de la Farm Credit Bank de Baltimore. Avec un tel parcours, difficile de s’imaginer que Robert Parker va devenir une personnalité emblématique du milieu du vin. 

Il faut revenir quelques années en arrière, en 1967, pour que le vin croise son chemin. À l’époque, Robert a 21 ans et effectue un séjour à Strasbourg. Par soucis d’économie, il décide de prendre un verre de vin de table plutôt que son habituel Coca, vendu plus cher que le vin. C’est alors que lui vint une révélation et une réelle passion pour le vin, ce nectar qu’il dégustera des centaines de milliers de fois au cours de sa vie. Il décida de revenir chaque vacance d’été en France afin de parcourir et découvrir les vignobles français.

Il rédigea en 1975 son premier texte sur le vin et commença à publier en 1978 une lettre d’information par courriel contenant des notes de dégustations sous le nom de The Baltimore-Washington Wine Advocate. Il renomma l’année suivante ses écrits en The Wine Advocate mais ce n’est qu’en 1984, après 10 ans de bons et loyaux services en tant qu’avocat, qu’il décide de démissionner pour se consacrer uniquement au vin.

En plus du Wine Advocate, le critique américain Robert Parker a également écrit dans sa carrière, et notamment durant les années 90, pour d’autres magazines tels que BusinessWeek, Food and Wine et il a décidé d’assurer son nez et son palais pour un million de dollars, lui valant le surnom du “nez à un million de dollars”.

robert parker desgustation vin

Le millésime 1982

Robert Parker a su rapidement fonder sa réputation à l’international et notamment lors de la campagne des primeurs des vins de Bordeaux du millésime 1982. Les commentaires de dégustation qu’il rédigea louaient les qualités du millésime qu’il trouva superbe, s’opposant aux avis des autres critiques et des négoces qui jugeaient ce millésime comme inférieur à celui de 1981.

Suite à cet évènement et à d’autres jugements controversés, les négoces ont perdu leur crédibilité et Robert Parker est devenu une voix de confiance. Aujourd’hui, le débat est clos puisque 1982 est considéré comme un excellent et très grand millésime.

Le Classement Parker

Robert Parker est également à l’origine du classement sur 100 points, permettant de déterminer la qualité d’un vin via une notation en complément des commentaires de dégustation. Ce classement se confronte aux critiques Européens qui préfèrent un barème de notation sur 20, à l’image de ses homologues du Michel Bettanne et Henry Desseauve par exemple. Les notes attribuées par Robert Parker vont de 50 à 100 points et se répartissent de la manière suivante : 5 points pour la robe, 15 points pour le bouquet, 20 points pour la bouche et la longueur, et 10 points pour le potentiel d’évolution du vin au fil du temps.

En additionnant les points pour chaque élément analysé lors d’une dégustation à l’aveugle, Robert Parker crée différentes catégories au sein de ce classement pour juger et définir la qualité globale du vin : 

  • 96-100 (A+) : un vin extraordinaire, rempli de profondeur et de complexité, une cuvée grandiose.
  • 90-95 (A) : un vin excellent doté d’une grande complexité.
  • 80-89 (B) : un très bon vin, complexe et fin.
  • 70-79 (C) : un vin plaisant, mais qui manque de complexité ou de profondeur.
  • 60-69 (D) : un vin très moyen, avec des défauts ou peu équilibré.
  • 50-59 (F) : un vin inacceptable (manquant d'équilibre, avec de gros défauts, terne ou très dilué).

Il faut noter que ce système 100 points Parker a été adopté par Wine Spectator, autre célèbre magazine spécialisé, mais avec des critères de notations différents. Pour rendre cette notation la plus fiable que possible, les vins sont dégustés à plusieurs reprises au cours de leur vie : une première dégustation à lieu lors des primeurs, c’est-à-dire avant même que le vin ne soit mis en bouteille et généralement, une deuxième dégustation un à deux ans après la mise en bouteille. Ainsi, on peut se rendre compte du réel potentiel du vin et il est possible de réévaluer la qualité d’un vin et de modifier la note attribuée pour davantage de précision.

Malgré l’influence de ce classement, certains acteurs du monde du vin le jugent comme manquant de précision puisque la majorité des grands vins obtiennent une note de 90 ou plus. Le système sur 20 points, qui hiérarchise les vins en 8 catégories plus affinées est donc parfois préféré. Une chose qu’on ne peut lui reprocher et d’avoir poussé la majeure partie des critiques et journalistes du milieu à adopter une méthode de dégustation à l’aveugle, comme le fait le Guide Hachette, permettant de ne pas biaiser les notes et les appréciations.

"Robert est aux vins ce que Larousse est aux mots : une encyclopédie."

signature robert parker wine advocate


L’influence du critique

La plupart des journalistes ont un rôle déterminant dans le jugement de la qualité d’un millésime mais personne n’a autant eu d’influence que le critique de vins Robert Parker. En fonction des scores attribués, la cote d’un vin peut chuter ou au contraire monter en flèche après publication d’une nouvelle note. Ce fut notamment le cas lorsque deux châteaux ont obtenu la note parfaite de 100/100 après la réévaluation du millésime 2009. D’un côté, le Château Smith-Haut-Lafitte (Grand cru classé de Graves) a vu son prix doubler au lendemain de la sortie du nouveau score. De l’autre, le Château Léoville Poyférré (Deuxième grand cru classé de Saint-Julien) est passé de 60 euros HT pour sa sortie primeurs à 175 euros HT, suite à la réception de la note de 100/100.

Les notes attribuées par Robert Parker sont donc devenues de réels outils marketing pour les cavistes et les châteaux, fiers d’afficher les scores obtenus pour leurs vins lorsque ceux-ci dépassent la barre des 90 points. Difficile de croire que le jugement d’un seul homme peut avoir des conséquences aussi importantes sur les prix ainsi que sur le regard que les consommateurs peuvent porter sur un vin.

robert parker verre vin

Le “goût Parker”

Au vu des notes attribuées par le célèbre dégustateur au fil des années, il en ressort que Robert Parker a une affinité particulière pour les vins rouges tanniques, puissants et boisés. Une grande partie des vins ayant obtenu la note de 100/100 sont des vins rouges de Bordeaux, de Côte-du-Rhône (notamment de Châteauneuf-du-Pape, Hermitage et Côte-Rotie) ou des vins Californiens. À titre de comparaison, seulement très peu de Bourgognes, au style davantage léger et fruité, n’ont obtenu cette note parfaite de 100/100.

Les goûts de chacun et l’appréciation d’un vin sont subjectifs mais l’influence du critique américain est telle que certains domaines viticoles modifient leur manière de travailler pour élaborer des vins qui collent aux affinités de Robert Parker. Cela passe par une utilisation quasi systématique de fûts neufs pour l’élevage ou par des méthodes de vinification allant à l’encontre de celles traditionnellement employées, adaptées aux terroirs et aux régions. Ses détracteurs l’ont longtemps accusé de “parkerisation” et le film Mondovino raconte les conséquences qu’a pu avoir Robert Parker sur l’uniformisation de la production et du goût des vins pour arriver à le séduire.

L’après Robert Parker

En 2013, Robert Parker, à l’âge de 65 ans a décidé de vendre The Wine Advocate à des investisseurs asiatiques. Cette annonce a provoqué un séisme dans le monde du vin et certains critiques mondialement reconnus tentent de combler le manque causé par sa retraite prise en 2019. On peut citer notamment la célèbre critique et rédactrice britannique Jancis Robinson ou Antonio Galonni, ancien membre de The Wine Advocate et maintenant PDG de Vinous, autre média très influent de la sphère viticole.

Depuis certaines applications ont vu le jour, comme Vivino qui permet à ses utilisateurs de noter les vins et de partager leurs appréciations à la communauté et la presse spécialisée papier perd du terrain au fil des années.

Alors qu'en France certaines personnalités comme Bernard Magrez ou Michel Rolland ont marqué le monde du vin à leur manière, peut-on espérer qu'un français devienne le critique viticole de référence de demain ? Ce qui est certain, c’est que Robert Parker n’a cessé d’influencer l’univers du vin tout au long de sa carrière et qu’il profite dès à présent d’une retraite bien méritée aux côtés de sa femme dans le Maryland.